La forêt a depuis toujours été la plus grande richesse du massif des Vosges, une richesse commune à trois régions, une richesse séculaire qui a joué un rôle déterminant dans l'histoire du massif et qui joue encore aujourd'hui un rôle économique non négligeable.
La forêt est une ressource quil est indispensable de préserver, car c'est en partie sur elle que repose l'avenir des régions qu'elle couvre.
La
forêt a depuis des temps immémoriaux
tenu une place privilégiée dans la vie des
habitants des Vosges, et ce au cours
de toutes les époques. Son rôle a toujours
été déterminant et a
constitué la
base naturelle sur laquelle l’implantation humaine
s’est déployée. A l’origine,
les Vosges étaient un massif où la
forêt était omniprésente, tout
particulièrement dans les zones de relief, avec peu
d’espaces ouverts, si ce
n’est, et de manière très
réduite dans les vallées larges et plates de la
Moselle et de la Moselle.
Le fond de la vallée de Reherrey et le Col de Xiard
Cette
situation particulière
des Vosges lui a valu des répercutions importantes, en
termes de peuplement
humain. Sa pénétration a
été lente, bien que la présence
humaine soit attestée
depuis fort longtemps (présence de dolmens et de pierres
à cupules) dans un
environnement forestier et montagnard (comme en Forêt
de Fossard). Les
Celtes s’y sont implantés aisément
(camp de la Bure) et les romains ont gagné
l’Ouest du massif où ils ont construit des voies
ainsi que des cités
(Bains-les-Bains, Plombières-les-Bains, Xertigny). Quelques
voies traversaient
même, dans un milieu sauvage, les cols de Saulxures et de
Bussang.
Lors
des invasions
germaniques qui ont gagné la vallée de la Moselle
(chute de Trèves en 406), le
plateau lorrain et la plaine l’Alsace, le massif et la
forêt vosgienne ont
constitué une barrière culturelle et linguistique
séculaire entre les
populations romanes
et les populations
aux dialectes germaniques. Par la suite, des établissements
monastiques se sont
établis suite à l’arrivée de
moines (comme Saint Romaric), ce qui
a conduit à l’édification
d’abbayes
(Remiremont, Luxeuil, Saint-Dié, etc.). L’abondante forêt fut lentement
défrichée, dans les vallées,
où
les populations vivaient en relative autarcie, adoptant un mode de vie
original, sans grands contacts avec l’extérieur.
Le
chapitre de Remiremont fut,
au cours du Moyen-âge un des plus respectés et des
plus
riches de l’Empire,
s’appuyant sur des Bans dotés de grandes et
prodigues
surfaces. La qualité des
forêts ainsi que les ressources tirées de la terre
permirent aux habitants de faire face aux famines tout en subvenant à
leurs besoins vitaux. Ceci
n’empêchait cependant pas les
invasions (Hongrois au Xème siècle), ni les
bouleversements extérieurs (guerre
de Trente Ans au XVIIème siècle) de gagner la
montagne
vosgienne. Les contacts
entre les Vosges et l’extérieur furent plus
nombreux que
l’on pourrait
néanmoins le penser, la présence de la
forêt ne
constituant point un obstacle
aux relations et aux mouvements humains.
La
forêt a de tous temps
fournit les matériaux nécessaires aux habitations
et aux constructions, au
chauffage ; le bois servait à la fois de
matière première, d’outil ainsi
que de marchandise via le flottage, en particulier pour la construction
de
navires. La
forêt a été, jusqu’au
XIXème siècle la base de
l’économie vosgienne, son
exploitation faisant vivre de nombreux individus, notamment les
Schlitteurs,
qui ramenaient dans les vallées, à
l’aide de luges sur des rondins de bois, le
bois ramassé sur les hauteurs. Le recul séculaire
de la forêt, du fait de
l’exploitation intensive de celle-ci s’est
poursuivi tout au long du Moyen-âge,
les hauteurs furent déboisées, ouvrant des
espaces aux pâturages dans les
secteurs de la vallée de la Moselle, de la Vôge,
de la Moselotte. Un
pastoralisme original se développa sur les hauteurs avec la
construction de
fermes typiques. Les domaines de montagne
défrichés ou en forêt
étaient divisés
par des petits murs de pierre tout à fait
caractéristiques présents sur tout le
territoire montagneux du Pays de Remiremont ainsi que les secteurs
montagneux
de la Haute Moselotte, de la Vologne, de la Meurthe. Tout ce territoire
possédait cette caractéristique unique de la
montagne vosgienne, que l’ont
retrouve encore aujourd’hui à proximité
des Chaumes des Vosges. L’économie
pastorale située sur les parties intermédiaires
des moyennes vallées de la
Moselle, de la Moselotte et de la Vologne a progressivement
périclité du fait
de l’attraction des industries des fonds de
vallées et les fermes ont été
livrées à l’abandon puis lentement
à la forêt de résineux. De nombreux
sentiers
pavés ainsi que des ruines forestières attestent
encore de nos jours de la
vitalité de ce patrimoine oublié
La
population du secteur de Remiremont et de ses environs fut à
l’époque de la
Révolution très élevée,
traduisant l’exceptionnelle capacité de ce
territoire à
accueillir, du fait de sa richesse intrinsèque une
population dense. Des
phénomènes nouveaux apparurent, telles que
l’industrialisation progressive des
vallées, reposant sur l’emploi de la force
hydraulique (barrages), qui permit
l’essor du textile, des tréfileries, des scieries
modernes.
La
forêt fut très intensivement exploitée
au cours des XVIIIème et XIXème
siècles,
ce qui conduisit de nombreuses montagnes à en être
dépouillées par endroits
quasi-totalement. La réglementation à
l’égard de l’exploitation de la
ressource
forestière, tant sous le régime féodal
qu’après la révolution fut
particulièrement drastique et le braconnage
sévèrement réprimé.
La
forêt amorça un mouvement de reconquête
progressif
au cours du XXème siècle, à
l’instar des autres régions françaises
à la
même époque, mais avec des
problématiques spécifiques.
L’économie
liée à l’exploitation
forestière demeura
d’importance mais la désertification des Hauts
liée
à l’industrialisation amena
une fermeture des territoires au profit de la forêt naturelle
ou
des
exploitations de sapins, alors une denrée de grande valeur.
Le
phénomène est
particulièrement visible dans le secteur des Vosges
Saônoises. Les scieries,
alors près de 800 employèrent une main
d’œuvre nombreuse jusqu’aux
années des
Trente Glorieuses où les mutations des constructions, de
l’énergie ainsi que
les problèmes de solvabilité et de
compétitivité poussèrent nombre de
celle-ci
à fermer ou à se restructurer. Le secteur fut
alors
sinistré dans les années
70, 80 et 90. Les récentes années, du fait de
soucis
écologiques liés au
renouveau des constructions en bois ainsi qu’un regain
d’intérêt pour le bois
en tant que source d’énergie.
Le
mouvement d’extension de la forêt se poursuit
encore à l’heure actuelle, et ce
en dépit de la tempête de 1999 qui a
causé beaucoup de dommages au patrimoine
forestier.
La
forêt couvre aujourd’hui environ la
moitié du territoire vosgien et une part
majeure du territoire du Pays de Remiremont. Celle-ci est
particulièrement
présente dans les secteurs montagneux où elle
couvre la quasi-intégralité des
montagnes avec des vallées largement
déboisées et cultivées. La
Vôge présente
un paysage vallonné, davantage
équilibré et répartit entre champs et
forêts
avec des vallées boisées. Les conditions
Route Forestière d'Haumantarde
climatiques qui associent à la fois
humidité importante, zone de moyenne montagne sans froid
excessif, chaleur
suffisante ainsi que sols favorables ont permis
l’installation d’une couverture
forestière immense, ceci d’autant plus que le
développement de l’habitat humain
n’a que peu empiété sur les grandes
zones boisées.
La
composition même de la forêt est
différentiée entre une
prééminence des
feuillus sur la Vôge et dans les vallées et une
domination des résineux dans
les secteurs de montagne ; les essences sont globalement
diversifiées avec
de nombreuses variété même si celle-ci
se concentrent de manière assez forte sur
le hêtre et dans une moindre mesure le chêne pour
les feuillus, et le sapin
pour les résineux. Ceci tient surtout aux facteurs
climatiques et
géographiques, les zones de montagne présentent
en effet des températures plus
basses et contrastées que la Vôge et les
Vallées, ainsi qu’une hydrographie
plus forte, ces conditions, auxquelles s’ajoutent un
enneigement plus important
conviennent davantage au sapin et à sa grande
résistance. Nous pouvons
également observer des différences quant
à la période végétative des
arbres et
des plantes, en fonction de l’altitude. La
végétation située sur les sommets,
en particulier au-delà de 800 mètres
possède une période
végétative inférieure
de quelques semaines à quelques mois en fonction des lieux
d’établissement,
ceci est dû à la fois aux températures
basses, à l’enneigement constant ainsi
qu’au vent plus fort régnant sur les sommets.
La
mixité est courante, et ce dans tous les secteurs du Pays de
Remiremont, nous
pouvons ainsi retrouver des essences de feuillus au cœur des
zones montagneuses
où prospèrent les résineux. De
manière générale, les secteurs
gréseux de
l’Ouest sont davantage favorables aux feuillus tandis que les
sols granitiques
plus exigeants favorisent les résineux. Les forêts
de Thiébémont, et de la Vôge
sont composées exclusivement d’essences de
feuillus, les forêts situées à la
bordure de la Vôge et du massif vosgien sont souvent mixtes,
c’est surtout le
cas dans les secteurs des forêts de Raon et de Humont
à l’ouest de la Moselle
et de Fossard à l’est de la Moselle. La
mixité se retrouve également dans les
forêts d’Hérival et dans une moindre
mesure de Longegoutte. Les forêts de
Remiremont ainsi que celles situées sur les hauteurs de
Moselle et de Moselotte
voient davantage la domination des résineux.
La
répartition
des essences est toutefois quelque peu biaisée par le fait
que de nombreuses
plantations de sapins ne découlent pas de processus naturels
mais proviennent
des plantations faites par les Hommes afin d’exploitation
forestière.
Les
forêts présentent donc des structures
diversifiées quant à leur composition interne, ce
qui en fait leur richesse,
surtout lorsque celle-ci s’est faite naturellement et en
conjonction avec le
développement d’une flore
caractéristique.
Chaque
forêt du Pays de Remiremont est unique quant à sa
taille, sa composition au
niveau des essences, sa richesse florale et faunique. La position
géographique
est décisive car c’est elle qui conditionne toutes
les caractéristiques des
forêts, le milieu et le sol dans lesquels elles se
développent jouent également
un rôle essentiel en privilégiant telle ou telle
essence d’arbre et de plante
ainsi que certaines espèces d’animaux vivant en
harmonie avec la forêt. La
diversité et la richesse biologique de chaque
forêt sont propres et découlent
des conditions plus ou moins favorables au développement et
à la préservation
des espèces et des essences.
La
forêt s’éveille de manière
générale au mois d’avril, et ce en un
espace de
temps très court les feuillus prennent leurs feuilles, les
résineux accroissent
leurs branches, l’aspect de la forêt, sombre et
composée de vert-foncé pour les
résineux et de brun pour les feuillus devient ainsi lumineux
et vert-clair. La
végétation devient alors très fournie
voire luxuriante en certains secteurs
particulièrement exposés au soleil,
c’est alors toute la forêt même qui
change
d’aspect et prend ses dispositions pour un
été chaud favorable à sa croissance.
A partir de la fin du mois d’août, après
et au cours de la saison des
champignons, l’été touche à
sa fin et les journées raccourcissant, les feuilles
se mettent à tomber au cours des mois de septembre-octobre
voire novembre. Le
rafraîchissement de l’air se réalise
dans un climat plus humide, les forêts
deviennent souvent brunes, parfois multicolores. Puis vient le temps
des premières gelées, après
l'été indien, puis de
la
neige vers novembre, les forêts nues s’endorment
jusqu’au retour du lointain
printemps suivant.
Val de Combeauté en aval du Prieuré d'Hérival
Le cycle végétatif des arbres est très variable selon les altitudes, de 6 mois en plaine et dans les vallées, il se raccourcit de 1 mois environ à 800 mètres et de 2 mois à partir de 1000 mètres du fait des conditions climatiques plus difficiles. Des spécimens extraordinaires d’arbres tordus par le dur climat de montagne se trouvent sur les chaumes. Le cycle végétatif des arbres est très variable selon les altitudes, de 6 mois en plaine et dans les vallées, il se raccourcit de 1 mois environ à 800 mètres et de 2 mois à partir de 1000 mètres du fait des conditions climatiques plus difficiles. Des spécimens extraordinaires d’arbres tordus par le dur climat de montagne se trouvent sur les chaumes d’altitude.
La
forêt a autrefois beaucoup souffert du
développement des industries polluantes
des grandes zones urbanisées et industrialisées
de la Ruhr, du Nord et de la
Belgique ainsi que du Bassin parisien. Celles-ci étaient
gravement affectées
par le phénomène des pluies acides
découlant de l’émission de gaz acides
qui
contribuèrent à faire
dépérir nombre
d’arbres, en majorité des résineux,
situés sur les massifs exposés aux vents.
Cette situation a été peu à peu
résolue du fait de changements dans
l’activité
économique (moins industrielle), au niveau des modes de
production (moins
polluants) ainsi que
d’exigences accrues en termes d’exigences
environnementales. A l’heure
actuelle, la forêt n’a plus trop à
souffrir des pluies acides, et sa vitalité
originelle a ainsi quasiment pu été
retrouvée
Les
forêts sont aujourd’hui des sources importantes de
revenu, tant pour les
communes, que de l’Etat, propriétaires respectifs
des forêts communales et
domaniales. Leur exploitation apporte une part importante des revenus
de
nombreuses communes dont le patrimoine forestier peut
représenter régulièrement
plus de la moitié de leur surface territoriale. Ceci est
renforcé par le fait
que la plus grande partie du domaine forestier se trouve sous domaine
publique,
les propriétaires privés ne possédant
qu’une part minoritaire des surfaces,
notamment en bordure des massifs forestiers.
L’activité
de coupe du bois se révèle, malgré les
fluctuations des cours mondiaux, d’une
singulière vivacité. Les profondes mutations qui
l’on affecté (disparition de
nombreuses scieries traditionnelles, mécanisation de la
coupe).
Les
débouchés sont relativement nombreux et
diversifiés, en particulier dans le
domaine du chauffage où le bois profité
d’un regain d’intérêt
croissant en
qualité de ressource énergétique
renouvelable, bon marché et efficace. Le
secteur de la papeterie est également gros consommateur de
bois, tout comme le
bâtiment ; enfin, d’autres applications
existent, faisant de ce patrimoine
une ressource hautement valorisable dans le futur.